Histoire de Montdidier
Livre II - Pièce justificative 86
par Victor de Beauvillé
Pièce justificative 86
Pièces concernant la navigation des rivières d'Avre et des Dom.
1603-1604.
Requête de M. de Gaucourt aux maieur et échevins d'Amiens.
5 août 1603.
A tous ceux qui ces présentes verront. Les échevins de la ville et cité d'Amiens, salut : sçavoir faisons et par ces présentes certifions à tous ceux qu'il appartiendra, qu'il y a six mois ou environ, le sieur de Gaucourt (François de Conty d'Hargicourt) seroit venu en notre chambre du conseil nous remontrer qu'il y avoit moyen de faire fleurir et rendre libre la rivière d'Avrain pour porter bateaux depuis Pierrepont jusques au bourg de Moreuil, ainsi qu'elle avoit été anciennement, et qu'en ce faisant ce seroit une grande commodité et utilité, tant de cette ville d'Amiens de Montdidier, que lieux circonvoisins. Auquel sieur de Gaucourt nous aurions fait réponse, que si telles choses se pouvaient faire par lui, nous le trouvions utile et nécessaire pour le bien et utilité de la ville. Depuis lequel temps et environ depuis trois mois ledit sieur de Gaucourt auroit fait travailler à la rivière d'Avrain, a fait nettoyer le viel cours, vulgairement appelé la rupture damoiselle Jehanne, par où soullaient passer anciennement les bateaux, en telle sorte qu'il auroit rendu la dite rivière naviguable depuis ledit Pierrepont et Gaucourt jusqu'au dit Moreuil, durant lequel temps avons reconnu qu'il est arrivé en cette ville beaucoup plus grande quantité de gros bois et fagots qu'auparavant la retenue de ladite rivière, et qu'a l'avenir, par le moyen dudit cours et flue d'eau, il viendra plus grande quantité de grains, vins, bois, qu'il n'a fait le passé et à beaucoup plus juste prix, d'autant que les vins qui viennent du vignoble dudit quartier qui se conduisent par charriot qui est chose fort couteuse diminueront le prix de chacune pièce de vin de 20 à 25 sous, joint que c'est chose toute notoire que, le plus grand cours des rivières apportant grande commodité dans toutes les villes voisines ; de laquelle notification ledit sieur de Gaucourt nous a requis ces présentes à lui octroyées pour lui valloir et servir en temps et lieu ce que de raison ; en témoin de ce, nous avons fait mettre à ces présentes le sçel aux causes de ladite ville. Donné audit Amiens, en la chambre du conseil de l'hôtel commun de ladite ville, le 5e jour d'août l'an 1603.
Mannessier. Avec paraphe et scellé.
Requête présentée par la dame de St-Jauvrin, au comte de Chaulne, pour le débouchement de la rivière.
20 août 1603.
A Monsieur le comte de Chaulne, lieutenant général pour le roi en la province de Picardie et gouverneur et lieutenant général de la ville et prévôté de Péronne, Montdidier et Roye.
Remontre Marie de Créquy, dame de St-Jauvrin, usufruitière de Moreuil, comme de tout temps et ancienneté, la rivière d'Avrain descendante de Pierrepont près Montdidier au bourg de Moreuil, souloit porter bateaux pour l'utilité des villes d'Amiens, Montdidier et du public et pour passer par l'ancien cours appelé rupture de demoiselle Jehanne appartenant à la seigneurie de Quiry le Bret, laquelle rupture depuis quelques années auroit été refermée par les meuniers du moulin de village de la Neuville, appartenante à la d. dame, pour faire enfler le cours de la rivière allant audit moulin qui étoit corrompre le cours ordinaire, au moyen de quoi et les choses ayant été négligées, pour être remises en leur premier état par les seigneurs de Moreuil prédécesseurs de la dite dame et des sieurs voisins de lad. rivière y ayant intérêt, auroit été avéré par le sieur de Gaucourt par le consentement de lad. dame, conformément à la volonté du roi, qui désire la navigation et port de rivière être expédient pour l'utilité et commodité desdites villes et du public de pourchasser et rendre ladite rivière naviguable ; à cette fin, le sieur de Gaucourt, du consentement de ladite dame et du sieur de Quiry le Bret, qui ont les principaux droits et intérêts, comme seigneur de ladite rivière, auroit fait nettoyer icelle suivant son ancien cours et plus faict relever les rives et bordages et fait travailler où il étoit requis et nécessaire pour le passage desd. bateaux qui auroient continué d'aller et venir chargés de bois et autres marchandises au rivage fait sur la seigneurie de Gaucourt, pour être menées aud. bourg de Moreuil, au préjudice de quoi et depuis quelques jours, le sieur de Champie, voisin de ladite rivière à cause de sa terre de Brache, sans néanmoins avoir aucun droit aux anciens cours ni aux rivages, auroit de sa seule autorité fait venir au son de la cloche ses sujets dudit Brache et fait reboucher le cours de ladite rivière, où passoient lesd. bateaux et le lendemain auroit fait appeler led. sieur de Gaucourt, par devant MM. des requêtes du palais à Paris, pour se voir condamné à réparer ladite rupture.
Ce considéré, Monsieur, il vous plaise et attendu que telles voies de fait et entreprises faites par led. sieur de Champie et contre la volonté du roi, au préjudice des dites villes d'Amiens et de Montdidier et du public, il vous plaise ordonner par provision, et sans préjudice aux droits des parties, intérêts d'iceux en cas qu'il sera trouvé, que led. cours de rivière bouché par led. sieur de Champie et ses sujets, sera ouvert pour passer lesdits bateaux, pour leproffit et utilité des dites villes et du public, et ce jusqu'à ce qu'autrement en soit ordonné par mes dits sieurs des requêtes par devant lesquels lesdits sieurs de Champie et de Gaucourt sont assignés.
Marie de Créquy.
Vu la remontrance ci dessus certiffiée de la noblesse du pays, certain contrat passé entre messire Jehan de Soissons, sieur de Moreuil, bailli de Vermandois, et Laurent de Bethencourt et demoiselle Marie Marguerite de Fillicans, seigneur de Braches et de Quiry le Bret en date du 20 avril 1487, attestation des eschevins de la ville d'Amiens du 5 du présent mois de la présente année, portant tous les dits titres l'utilité du cours de la rivière d'Avrain, l'antiquité d'icelui par la rupture appelée demoiselle Jehanne, avons ordonnée conformément à la volonté du roi pour le bien et utilité du public et commodité des villes voisines et du pays que le cours bouché par le sieur de Champie sera ouvert, par provision, pour porter bateaux depuis Pierrepont jusques à Moreuil, et ce jusqu'à ce qu'autrement en soit ordonné par MM. des requêtes du palais par-devant lesquels l'instance entre les sieurs de Champie, de Gaucourt est intentée pour ce regard. Fait à Margny, le 20 août 1603.
Chaulnes.
Ordonnance du comte de Saint-Paul, gouverneur de la Picardie, pour le débouchement de la rivière.
18 novembre 1603.
Sur la remontrance à nous dès il y a longtemps faite par le corps de ville d'Amiens, que pour le bien et utilité de la ville de Montdidier, Corbie, mesmement du public, il étoit expédient de rendre la rivière naviguable deux lieues plus haut que le bourg de Moreuil, même jusqu'au dit Montdidier, en faisant netoyer et relever le viel cours de la rivière d'Avrain appellé rupture demoiselle Jehanne par où de toute ancienneté passoient les bateaux, ce que nous aurions trouvé bon, permis et ordonné pour le bien public au sieur de Gaucourt comme plus proche de la rivière d'y faire travailler ce que suivant notre ordonnance et commandement il auroit fait, en sorte que les bateaux ont depuis continué d'aller et venir chargés des vins, bleds, bois et autres marchandises depuis le village de Pierrepont et Gaucourt jusqu'à Moreuil. Ce néanmoins depuis trois mois en ce, et pendant notre absence, auroit été donné empêchement au passage desdits bateaux par le sieur de Champie qui auroit de son autorité privée fait boucher ledit cours de la dite rivière où passoient lesdits bateaux, au grand préjudice et intérêt desd. villes et du public qui avoit été l'occasion que la dame de Saint-Jauvrin, les sieurs d'Estourmel, de Plainville et autres de la noblesse du pays et voisins de lad. rivière, auroient avec certification dudit corps de la ville d'Amiens en notre absence présenté requête au sieur le comte de Chaulnes, lieutenant général en notre gouvernement pour le faire deboucher ce que après avoir reconnu, tant par titre qu'autrement qu'il étoit expédient d'entretenir ledit vieux cours de la rivière pour passer les bateaux pour plus d'aisance et commodité des dites villes et du public, il auroit ordonné que le cours de la dite rivière bouché par led. sieur de Champie seroit ouvert et débouché, et d'autant que nous avons été averti qu'au préjudice de nos ordonnances ci-devant faites et celle du sieur comte de Chaulnes, aucuns se vantent de vouloir empêcher led. cours de rivière et passage de bateaux, nous avons ordonné et ordonnons que ledit cours de rivière appelé rupture demoiselle Jehanne, qui a été relevé et nettoyé pour le passage desd. bateaux sera libre et entretenu par la commodité et utilité desd. villes et du public, défendons à toutes personnes de quelque qualité et condition qu'elles soient d'y donner aucun empêchement jusqu'à ce qu'autrement en ait été ordonné, ou si aucun étoit si téméraire que l'entreprendre au mépris de nos dits ordres, mandons au procureur du roi d'en informer pour être les infractaires punis selon l'exigeance du cas, et afin que ces présentes soient notoires à chacun elles seront publiées où besoin sera. En témoin de quoi nous les avons signé de notre main et à icelle fait apposer le cachet de nos armes, à Amiens le 18e jour de novembre 1603.
François D'Orléans.
Par monseigneur, de Paris.
Arrêt du roi du 13 décembre 1603.
Henri, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre, à feaux nos sieurs Nicolas de Lau et Henri Pingré, trésoriers généraux de France en Picardie, salut. Sur la remontrance qui nous a été faite de la rivière d'Avrain ayant été depuis quelques années bouchée par les meuniers du moulin de la Neuville, à l'endroit appelé la rupture de demoiselle Jehanne, pour faire refluer lad. rivière au moulin ; les bateaux qui avoient accoutumés de descendre de Pierrepont et Gaucourt n'ont plus eu leur passage qui leur a été par ce moyen empêché et les gentilshommes et autres voisins de la dite rivière au dessus de la rupture demoiselle Jehanne par conséquent privés de pouvoir faire monter leurs bleds, vins et autres commodités par ladite rivière en notre ville d'Amiens et autres, lesquels ont aussi cessé d'en être accommodé en telle quantité ni en si bon compte que quand le cours ancien appelé rupture de demoiselle Jehanne était ouvert, ainsi qu'anciennement il avoit accoutumé d'être et lequel cours d'eau ancien ayant été ainsi que dit est par ci-devant fermé par lesdits meuniers, par succession de temps, aucuns ont voulu prétendre avoir intérêt et dommage à l'ouverture d'icelui, au grand préjudice du public pour le bien et utilité duquel, désirant faire tout ce qui nous est possible, considérant qu'une des grandes commodités qui est en un pays, est celle des rivières, principalement si elles sont naviguables et peuvent porter bateaux et que celle-ci sera d'autant plus utile et commode à ceux du plat pays et habitants de noire ville d'Anciens en celle de Montdidier et Corbie que plus longuement elle pourra porter batleaux, sçavoir faisons, que, nous a plein confiant de vos sens, suffisance, loyauté, prudhommie et expérience, pour les causes et autres à ce nous mouvans, vous avons commis, ordonné et député, commettons, ordonnons et députons par ces présentes pour vous transporter sur ladite rivière à l'endroit susdit appelé rupture demoiselle Jebanne, pour icelle avec notre procureur de la juridiction au ressort de laquelle est le cours ancien d'eau et en la présence de tout ceux qui ont quelque droit sur lad. rivière d'Avrain, depuis ledit Pierrepont jusques à Moreuil ou eux duement appellés, voir et reconnaître la commodité ou incommodité de l'ouverture aud. cours ancien d'eau, appellé ainsi que dit est rupture demoiselle Jehanne, tant pour le public que les particuliers ayant droit sur lad. rivière en l'étendue ci-dessus, l'intérêt ou dommage que les particuliers en peuvent recevoir, le moyen de les exempter et empescher au dommage et s'il ne se peut, quel dédommagement ils prétendent, et que vous jugerez leur devoir être raisonnablement fait, les moiens de le faire et qui le pourra et devra porter et en outre voir et rcconnoître si cette rivière se pouroit encore rendre naviguable au dessus dudit Pierrepont jusqu'à Montdidier ; si aucuns particuliers y auroient intérêt et quel dédommagement il leur en pourroit écheoir, ensemble d'où se pouroient tirer les moiens de supporter les dépenses qu'il y pouroit convenir faire et de tout en dresser votre procès-verbal et avis que vous nous enverrez, pour iceluy vu en estre par nous ordonné et que jugerons être pour le bien, utilité, et profit et commodité de notre pays de ce faire, vous avons et à chacun de vous, donné et donnons pouvoir et mandement spécial, mandons au premier de nos huissiers ou sergent assigner tous ceux que besoin sera et leur ordonnerez et faire tous autres exploits nécessaires à l'exécution des présentes sans pour ce demander placet, permission, visa ni pareatis. Et cependant ordonnons à tous nos officiers et sujets, qu'à vous et à nos dits huissiers et sergent en ce faisant soit obéi car tel est notre bon plaisir. Donné à Paris le 13e jour de décembre l'an de grâce 1603 et de notre règne le 15e, signé par le roy et scellé du grand scel de cire jaune.
Collation faite de la présente copie à son original étant en parchemin sain et entier tant en écriture signature que sceau, comme il est apparu aux notaires royaux au bailliage d'Amiens à eux exhibé, par le commis greffier des trésoriers généraux en Picardie de l'ordonnance du sieur de Lau l'un d'iceux, auquel ledit original a été rendu après lad. collation et ce sur la requête de François de Conty, sieur de Gaucourt, pour se servir de la dite copie et valoir après ce que de raison. Ce 8 janvier 1694.
Lesac. Gaudricourt.
Remontrances du Sr de Gaucourt, commissaire du roi.
13 février 1604.
Le treizieme jour du février 1604, s'est approché de nous, Nicolas de Lau, conseiller du roi et trésorier général de France, commissaire député par Sa Majesté en cette partie, le seigneur de Roquancourt, lequel, tant pour lui que pour la noblesse qui ont signé la requète par eux présentée à feu M. le comte de Chaulne et en persistant en icelle, nous a dit et rencontré que pour le grand bien, profit et utilité tant des villes d'Amiens, Abbeville, Montdidier qu'autres abordantes au port de mer et de tout le public, il est grandement requis et nécessaire de faire en sorte que la rivière qui conduit de Montdidier à Amiens soit rendue navigable, ut porte bateaux qui aillent debout et sans décharger de l'une desd. villes à l'autre et par le cours qui est de present depuis le village de Pierrepont jusques en lad. ville d'Amiens, qui est l'ancien cours appelé fosse rupture demoiselle Jehanne ou autrement la rivière d'Avrain, et comme souloit courir anciennement lad. rivière que nous avons reconnu être beaucoup plus commode que s'il étoit detourné et remis par le village de la Neufville, où il n'y auroit d'eau en pente suffisante et en telle abondance qu'elle porte ledit cours fait et remis à présent selon que dit est ; et comme il est porté par le contrat représenté par le seigneur de Gaucourt et commission à nous adressée, insistant à dire que cela fut fait, exécuté et entretenu pour estre la plus grande commodité que sa Majesté puisse ordonner estre fait en son pays de Picardie et le rendre riche et opulent à cause des manufactures qui se pourront l'aire et débiter, que toutes sortes de marchandises et denrées pourront arriver tant de la mer que des rivières qui s'y rendent, qui seront de la dite mer et rivière signamment des villes de St-Vallery, Boulougne et Abbeville, amener et ramener en la dite ville d'Amiens et dud. Amiens aud. Montdidier, de laquelle ville et à petits frais l'on pourra rendre lesd. marchandises et denrées des villes de Compiègne et Pont-Ste-Maxence, distance dudit Montdidier de sept petites lieues pour icelles les mettre sur l'eau et les transporter tant en la ville de Paris que Rouen, et par ainsi non seulement ledit pais de Picardie sera accommodé de la dite rivière, ainsi tout le royaume de France et si servira de seconde barrière pour led. royaume. De quoi le dit. sieur de Rocquancourt nous a requis acte.
Plus bas est écrit :
Acte audit sieur de Rocquancourt et de sa remontrance ci-dessus pour lui servir ce que de raison. fait à Pierrepont, le 13 février 1604. de Lau. Plus bas : Pour mondit sieur commissaire, Hourdeguy.
Sentence du commissaire député, du 16 lévrier 1604.
Nicolas de Lau, seigneur du Rosny en Beauvaisis, conseiller du roi, trésorier de France et général de ses finances en Picardie, commissaire en cette partie. Vu la déclaration faite pardevant. nous par la dame de St Jauvrin, dame de Moreuil et Neuville messire Bernard, le 12eme du présent mois de février 1604, reponse de messire Sipion de Champie, chevalier, seigneur dudit Brache sur icelle les 12e et 14e du présent mois de février, celle de François de Conty, Sr de Gaucourt et d'Hargicourt, maistre Adrien Deseaugues, seigneur de Quiry le Vert ou procureur pour lui, sur l'ouverture d'un cours ancien d'eau dit rupture demoiselle Jehanne, pour le courant et passage de la rivière d'Avrain, la remontrance faite par Francois de Conty, seigneur de Rocquancourt, tant pour lui que pour plusieurs gentilshommes demeurant, en la prevoté de Montdidier, qui ont signé une requête presentée ci devant à défunt M. le comte de Chaulne, lieutenant général en cette province de Picardie pour faire l'ouverture dudit cours demoiselle Jehanne pour le passage de ladite rivière, requérant que la dite ouverture soit entretenue et en état, semblable déclaration et requisition faite par les habitants du village d'Hargicourt appartenant audit sieur de Gaucourt aux mêmes fins ; les mémoires aussi à nous présentés par les habitants dudit Brache, appartenant audit sieur de Champie, des incommodités et dommage qu'il prétend d'avoir en l'ouverture dudit cours, tant en leurs particuliers qu'à cause du moulin du dit Brache requérant par cette occasion que lad. rivière soit remise en son premier état ; conclusion du procureur du roi au gouvernement et prévoté dud. Montdidier, auquel le tout a été communiqué, nous ordonnons que ledit sieur de Champie aura acte de la déclaration de la dame de St Jauvrin et de la reponse par lui faite sur icelle les 12 et 14 du présent mois, ensemble de la déclaration dudit sieur de Gaucourt et de Quiry le Bret pour lui servir sur ce que de raison et néanmoins, attendant ce que le roi et nos seigneurs de son conseil aient ordonné sur l'avis qui sera par nous donné à Sa Majesté de la commodité ou incommodité dudit cours dit rupture demoiselle Jehanne, suivant le procès-verbal de la visitation qui en a été par nous faite et dédommagement et intérêts qui seront pour ce dus, que led. cours de demoiselle Jehanne demeure en l'état qu'il est à présent pour le courant de la dite rivière et passage des bateaux, sans préjudice aux instances et différents pour ce mus et intentés entre led. sieur de Champie et de Gaucourt, de leurs droits et prétentions, dépens, dommages et intérest des parties ; ce qui leur sera signifié : Fait aud. Montdidier, le 16eme jour de février 1604. de Lau.
Arrêt du 6e jour d'avril 1604, rendu sur la requête de Francois de Conty.
Au Roi et à nos seigneurs de son conseil, François de Conty, sieur de Gaucourt, vous remontre très-humblement que, pour empêcher l'effet publié en votre province de Picardie touchant la navigation de la rivière d'Avrain, suivant le procès-verbal de descente de visitation du sieur de Lau, faite de l'exprès et commandement de Votre Majesté et pour ôter la connoissance de ce fait à votre conseil, ou le sieur de Lau auroit fait rapport de son dit procès-verbal, le sieur de Champie auroit présenté requete à Votre Majesté en son d. conseil contenant plusieurs faux prétextes et probablement inventés par le conseil dudit sieur de Champie, par laquelle en vrai lieu il expose qu'il lui appartient un lieu appelé la Rupture ou chaussée demoiselle Jehanne sur lad. rivière d'Avrain, et que de temps immemorial il a eu droit de tenir bouché et fermé ledit lieu appelé Rupture ; combien que cet effet ledit sieur de Champie n'ait droit ni appartenance quelconque en icelui lieu appelé Rupture, ne soit la terre de Brache audit sieur de Champie appartenant, contigüe et aboutissante au lieu susdit, lequel appartient au sieur de Quiry est assis et situé au dedans la seigneurie de Quiry, et est de droit d'icelle, et que tout le contraire de ce qui est allégué par ledit sieur de Champie apparaisse par un ancien titre en date du vingtième jour du mois d'avril 1487, par lequel le détournement de moitié du cours ancien de lad. rivière ne fut accordé que pour le temps et espace de six mois pour la commodité d'un moulin qui n'est plus en nature et ce sans empêchement du cours et navigation de ladite rivière qui ne pourroit être retenu ni bouché contre la teneur dudit contrat, ni au préjudice de gentilshommes voisins notamment du suppliant, seigneur du lieu de Gaulcourt ou de tout temps et ancienneté il y avoit un des ports de ladite rivière au lieu où souloit estre le chateau ce qui se peut lire même par les annales de France du règne de heureuse mémoire le roi Charles huitième, qui démontre que ce sont paroles de dire par le sieur de Champie qu'il a eu de tout temps le lieu appelé Rupture bouché et fermé vu, ce que dessus et quant à ce que ledit sieur de Champie allegue que le suppliant, de son autorité privée auroit débouché ledit lieu appelé Rupture et donné cours à lad. rivière, la repense est en premier lieu qu'il n'a procuré le cours de la rivière qu'à la prière et avis dudit sieur Quiry, seul seigneur et propriétaire dudit lieu et endroit appelé Rupture ; en second lieu, selon le vouloir exprès de Votre Majesté qui en fit la proposition étant en votre ville d'Amiens, suivi des mandements exprès dud. sieur le comte de Saint-Paul, votre gouverneur général en Picardie, et du sieur de Chaulne, lequel pour le commandement dudit sieur de Saint-Paul, sur la remontrance faite par le corps de la ville d'Amiens et sur la requête qui fut présentée par la dame de Saint-Jauvrain et de grand nombre d'autres gentilshommes du pays, fait en la présence du prevot des marechaux de la province, oter les obstacles que led. sieur de Champie auroit fait mettre pour empêcher le cours de la rivière par led. lieu et endroit appelé Rupture, led. sieur de Champie ayant induement fait appeler le sujet devant MM. des requêtes du palais, vu, etc. Suit l'énoncé du trouble causé par le sieur de Champie et des formalités de la procédure : Plaise à votre Majesté en évoquant l'instance pendante audit reglement du palais, faire droit par même arrêt, tant sur lad. demande dud. sieur de Champie, que sur les rapports et avis dud. sieur de Lau, commissaire député pour la continuation du cours de ladite rivière, ainsi que Votre Majesté, pour l'utilité du pais sur les remontrances de vos communautés et gentilshommes voisins avisera être et faire par raison, en ce faisant, attendu l'indue insistance dud. sieur de Champie, le condamner aux dommages intérêts et dépens du suppliant, lequel priera Dieu pour votre royale prospérité, François de Conty. Plus bas est écrit :
II est ordonné que les parties se présenteront par devant M. Langlois, conseiller du roy, et maitre des requêtes ordinaire de son hôtel, que Sa Majesté a commis pour être onies sommairement, par-devant lequel elles produiront leurs titres pour iceux vus et rapportés aud. conseil être ordonné ce que de raison. Fait au conseil du roi, tenu à Paris le 6e jour d'avril 1604. Waffres.
Arrêt du conseil.
Sur la requête présentée au roi en son conseil par François de Conty, seigneur de Gaucourl, gentilhomme de la maison de Sa Majesté, tendant afin que la rivière d'Avrain, descendant de Pierrepont et Gaucourt, qu'il a rendu navigable et portant bateaux pour l'utilité et commodité des villes d'Amiens, Abbeville, Corbie, Montdidier et autres de la province de Picardie et du public, par l'ancien cours vulgairement appelé rupture demoiselle Jehanne, laquelle rupture il a par ordonnance et commandement du Sr de Saint-Paul, gouverneur et lieutenant général en lad. province, fait netoyer, déboucher et relever pour y reprendre son cours et flue ordinaire pour le passage des bateaux, comme elle faisoit anciennement ; vu le contrat fait et passé à Montdidier le 20e jour d'avril 1487, entre Laurent de Bethencourt, à cause de sa femme, lors sieur de Brache et de Quiry, et le sieur de Moreuil, par lequel appert que de toute ancienneté la rivière portoit bateaux par led. cours ancien appelé rupture demoiselle Jehanne, la procuration spéciale passée par M. Adriens des Cauguins, élu en l'élection de Montdidier, seigneur dudit Quiry et dud. cours ancien de lad. rivière, à cette fin et pour déboucher et nettoyer et relever icelui pour le passage desdits bateaux pour l'utilite de ladite terre de Quiry et d'autres terres voisines et du public, l'exploit d'assignation donné en cas de saisine et nouvelleté aud. sieur de Gaucourt aux requêtes du palais à Paris à la requête du sieur Champie afin de faire déboucher ledit ancien cours, la requete présentée par la dame de Saint-Jauvrin et de Moreuil et plusieurs gentilshommes des pays voisins de ladite rivière, à feu comte de Chaulne, lieutenant général en lad. province, qui avoit fait. déboucher led. cours pour passer lesd. bateaux que ledit sieur de Champie avoit fait reboucher ; vu la commission du 13 décembre dernier, pour faire visitation de la commodité ou incommodité et de l'ouverture dud. cours ancien, tant pour le public que particuliers ayant droit sur ladite rivière, intérêt ou dommage que les particuliers en peuvent recevoir, les moiens de les empêcher dud. dommage et s'il ne se peut quel dedommagement ils demandent, la sentante dudit de Lau, du 16me jour de février dernier, par laquelle il auroit ordonné que par provision et en attestant qu'il en eut été jugé ledit cours ancien de rivière appelé Rupture de demoiselle Jehanne seroit entretenu pour le passage desdits bateaux. Tout considéré, le roy étant en son conseil, a ordonné et ordonne que lad. rivière d'Avrain, sera libre et entretenue pour porter bateaux chargés de bled, vins, bois et autres marchandises depuis Pierrepont et Gaucourt jusques à Moreuil, par l'ancien cours appelé Rupture de demoiselle Jehanne pour l'utilité et commodité du public et des villes d'Amiens, Abbeville, Corbie et Montdidier, sauf à faire récompense aud. sieur de Champie et autres qui pourront prétendre intérêt à cause des héritages et prés s'il en convient prendre aucun pour élargir le cours de lad. rivière et à ordonner par Sa Majesté d'icelle récompense s'il y a échu, et sur qui elle se devra prendre ainsi que de raison, ayant à cette fin évoqué et évoque à soi et à son conseil l'instance intentée par led. sieur de Champie aux requêtes du palais à l'encontre dudit sieur de Gaulcourt comme ainsi toutes les autres instances, appels ou appellations qui pourroient intervenir ci après à l'occasion de l'ouverture de lad. rivière d'Avrain et cours d'icelle par l'ancien canal, dont Sad. Majesté a retenu la connoissance et icelle interdite et deffendue à sa cour de parlement de Paris, à ses gens tenant les requêtes de palais et à tous autres ses juges quelconques. Maupeou.
Remontrance de François de Conty, à Nicolas de Lau, commissaire du roi.
François de Conty, seigneur de Gaucourt et Hargicourt, gentilhomme ordinaire de la maison du roi, remontre par forme d'avertissement pardevant vous M. de Lau, conseiller du roi de France, en la généralité do Picardie et comme député par Sa Majesté pour la visitation de la rivière d'Avrain, pour la facilité et utilité du port de bateaux suivant la plainte donnée par Sa dite Majesté pour répondre à l'assignation à lui donnée pardevant vous à protestation de ne lui pouvoir préjudicier ou pour intérêt par le sieur de Champie contre lui.
Que les sieurs et dames de Moreuil ni le sieur de Brache et de Quiry ne peuvent ni doivent donner aucun arrêt ni empêchement au cours de ladite rivière d'Avrain pour descendre et monter les bateaux de Pierrepont et Gaucourt à Moreuil chargés de bled, vins, bois et toutes autres marchandises pour passer par le cours ancien de ladite rivière appelé rupture demoiselle Jehanne, ny peuvent ne prétendre aucuns intérest ni aucuns droits. D'autant que le contrat passé entre les feux sires de Moreuil, de Braches et de Quiry, le 20e jour d'avril l'an 1487, appert qu'auparavant icelle et de tout temps et ancienneté la rivière d'Avrain à son cours et flux ordinaire par la rivière entrant aud. cours nommé rupture demoiselle Jehanne, pour par icelle passer lesd. bateaux comme l'ont ainsi maintenu lesd. sieurs de Brache et de Quiry.
Et par autres clauses portées par ledit contrat est expressément dit qu'au cas que les sieurs de Brache et de Quiry veulent faire et édifier un pont à la chaussée de Brache, au travers de lad. rivière d'Avrain, que en ce cas ils seront tenu faire led. pont si haut et suffisant qu'un bateau y puisse passer à vuide et à charge par dessous icelui pont sans nul empêchement.
Ce sont les clauses et termes portés par led. contrat qui fait connaître que de tout temps et ancienneté ladite rivière a eu son cours et flux ordinaire par led. cours ancien appelé rupture demoiselle Jehanne pour passer lesd. bateaux, comme l'ont ainsi reconnu lesd. sieurs de Brache et de Quiry, par icelui contrat.
Suivant ledit contrat, par l'ordre et commandement exprès de monseigneur le comte de St-Paul avec le consentement de Mme de St-Jauvrin et procuration spéciale du Sr de Quiry à qui appartient led. cours appelé demoiselle Jehanne, le sieur de Gaucourt a fait relever et nettoyer led. cours pour passer lesd. bateaux pour venir dud. Pierrepont à Moreuil pour la facilité et commodité de la ville de Montdidier, bourgs d'Avenescourt, Guerbigny, villages d'Hangest, Plessiés, Chaussoy, Quesnel, Contoire, Boussicourt, Fignières, Becquigny, Etelfay, Courtemanche, Gratibus et autres lieux.
Et pour l'abord et rivage dud. Gaucourt pour la facilité et commodité des villages de Bouillancourt, Hargicourt, Maresmontiers, Framicourt, Fontaine, Cantignies, Cardonnois, Villers-Tournelle, Serevillers, Rocquencourt, la forêt de la Herelle, Coullemelle, le Plessiés, Grivesne, Malpart et Aubvillers, tous lesd. villages sont ès environ du rivage dud. Pierrepont et Gaucourt dont les plus loing ne sont qu'à deux lieues.
Led. sienr de Gaucourt a reçu de grands intérêts par led. sr. de Quiry, qui, au préjudice de ceux au dessus de la rivière, et du public auroit fait reboucher par ceux qui étoient meuniers du moulin de la Neuville led. cours appelé rupture demoiselle Jehanne par où passoient lesd. bateaux, lesquels dommage et intérêt pour voir et juger par les âges des bois des environs qui auroient demeurés à abattre à faute de les pouvoir débiter pour la difficulté du cours de la rivière et du charroy.
Comme aussi des prairies que jugerez et entendrez par la commune renommée, avoir été toujours noiées par les bouchements et cours de rivière demoiselle Jehanne par lequel rebouchement lad. rivière auroit débordée de telle façon, qu'au lieu que lad. rivière devroit servir pour les débiter, elle les a empiré et gaté de telle sorte que comme il est notoire qu'on y mit le feu pour ne savoir rien faire de l'herbe desd. prés. Plus vous verrez et jugerez que la difficulté du charroy est si grande que les bleds, vins, bois et autres marchandises sont contraintes de demeurer sur les lieux par la grande rareté du charroy.
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